Éric entra dans le bureau de Patrick et regarda autour de lui. Le directeur des achats n’était pas là, mais il était clair qui occupait cet espace. Les photos sur le mur racontaient l’histoire d’un compétiteur. Au cégep et à l’université, Patrick avait été défenseur dans une équipe de hockey rarement perdante. Il y avait aussi un diplôme encadré en administration des affaires sur le mur.

“T’as l’air un peu perdu,” dit une voix soudainement.

Éric se retourna et vit un homme bien habillé. Le directeur des achats avait examiné des documents et ferma résolument le tiroir d’un classeur. Puis il fit signe à Éric de s’asseoir à côté du grand bureau en métal. Patrick traversa l’office à grands pas et s’assit en face du jeune ingénieur. Les présentations se faisaient sans poignée de main.  

“Nous avons un problème avec un joint, Éric a commencé. “J’ai parlé avec une entreprise qui pourrait nous aider, mais comment puis-je les faire mettre sur la liste des fournisseurs approuvés pour que je puisse commander auprès d’eux?”

Patrick sourit et se souvint du temps lorsqu’il était un jeune acheteur lui-même, au début de sa carrière.

“Ce n’est pas si simple que ça, commença-t-il patiemment. “Tout d’abord, quel est le prix de ces joints?”

“Je ne sais pas,” Éric répondit avec hésitation.

“Eh bien, c’est déjà ton premier problème ça, Patrick a répondu. “Et quelle est la quantité minimale de commande que nous devrons acheter de cette enterprise?”

“Je ne sais pas non plus”, répondit Éric.

“C’est donc ton deuxième problem”, Patrick a poursuivi. “Écoute, on ne t’a probablement pas appris ça à l’école des ingénieurs, mais ça ne sert à rien pour une entreprise comme la nôtre d’acheter beaucoup de marchandise et de la conserver en entrepôt. Ça bloque la circulation d’argent liquide et ça prend de la place qui coûte cher.”

Patrick interrompait son petit cours en gestion d’affaires et se souvenait du travail administratif qui l’attendait sur son bureau.

“Cette entreprise, fournit-elle autre chose que des joints? Je reçois constamment des notifications concernant des articles en rupture de stock de la part du département des opérations. Ces pièces sont toutes faites en caoutchouc ou en plastique.”

“Nous avons seulement parlé des capacités de leurs joints”, Éric répondit. “C’est mon plus grand problème en ce moment.”

Patrick commença à perdre sa patience. Éric avait vu quelque chose s’énerver sur le visage de l’ancien défenseur.

“Eh bien, MON plus grand problème en ce moment, ce sont des fournisseurs qui facturent trop, ne peuvent pas livrer à temps et qui ne peuvent pas fournir plus d’un type de produit. Il y a un coût pour faire affaire avec un fournisseur. On ne t’a pas appris ça à l’école des ingénieurs non plus n’est-ce pas?”

“Non, en effet”, Éric répondit tranquillement.

Patrick savait qu’il avait frappé le jeune homme durement. Il sourit et atténua son ton.

“Écoute, nous n’avons pas une relation si solide que ça avec notre fournisseur actuel de joints, tu sais”, dit le directeur des achats. “Mais l’essentiel est que leur prix est le plus bas. Et en plus, ce n’est qu’un joint en caoutchouc. Ce n’est pas comme si c’était un moteur diesel ou quelque chose.”

Éric avait l’air confus. Patrick jeta un coup d’œil sur sa montre et se leva pour mettre fin à la réunion.

“J’attends un appel à 11 heures”, dit-il d’un ton neutre. “Si tu veux que je prenne cette autre entreprise en considération, aiguise tes patins et prépare-toi à jouer la prochaine fois.”

Éric se leva lentement, remercia Patrick pour son temps et sortit du bureau d’un air abattu. Il savait qu’il devait aller dire à son patron que les choses n’allaient pas bien – et qu’il devait toujours résoudre le problème des joints qui coulaient.   

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